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Écrire « par les temps qui courent »

En 2020, sur ce même site,  j’avais publié un article qui posait la question : Écrire en période de pandémie ? (https://www.catherinelamourauteure.com/ecrire-en-periode-de-pandemie).

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La question se repose à moi aujourd’hui : guerre en Ukraine, tremblement de terre au Maroc, inondations en Lybie, bombardement d’Israël par le Hamas, tremblement de terre en Afghanistan, représailles israéliennes dans la bande de Gaza, attentat terroriste meurtrier à Arras, le tout sur fond de réchauffement climatique ! Chaque jour apporte son lot de nouvelles désespérantes. Passé un moment de sidération, le questionnement revient.

 

Ma réponse reste la même : l’art, quel qu’il soit, doit continuer à exister en toutes circonstances et nous aider à vivre. J’ai raconté, dans une de mes infolettres, l’histoire de cette ukrainienne qui,  au début de la guerre, passait les périodes de bombardement dans un abri souterrain avec sa famille et ses voisins. Elle emportait un livre et c’est la lecture qui lui permettait de supporter le fracas des bombes. Je pense souvent à cette femme...

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En ce moment, je lis des romans d'Agatha Christie. En fait, je la découvre sur le plan littéraire après avoir vu tant de  fictions inspirées de son œuvre. Dans « Hercule Poirot joue le jeu », qui date de 1956 (une période elle aussi tumultueuse), je suis tombée sur un dialogue qui à priori n’apportait pas grand chose à l’intrigue. Il s’agissait plutôt d’une digression philosophique, dont je pense qu’elle a permis à l’auteure d’exprimer une idée qui lui tenait à cœur.

L’un des personnages, un architecte un peu illuminé, défend l’’opinion qu’ « on ne peut plus, par les temps qui courent raisonner en termes d’individu ». « Lorsqu’il s’agit de vie ou de  mort, dit-il, chacun doit oublier ses petits soucis et ses petites misères ». Hercule Poirot répond par un souvenir : « Pendant la dernière guerre, raconte-t-il, alors que les bombes tombaient autour de moi, […] c’était précisément parce que je risquais de mourir que les moindres détails de mon existence prenaient soudain de l’importance ».

Et il explique : « C’est, peut-être, cette capacité de chacun à s’absorber en lui-même et en sa propre existence qui a permis à la race humaine de survivre. […] Il s’agit d’une forme d’humilité, et l’humilité a sa valeur. […] Tout ne dépend pas de Mme Tartempion de Trifouillis-les-Oies. Et si elle vient à le penser, elle n’en retirera rien de bon. Car pendant qu’elle s’interrogera sur le rôle qu’elle peut jouer dans les affaires de la planète, son gamin se renversera la casserole d’eau bouillante sur la tête. »

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À l’époque où j’étudiais l’histoire de ma famille durant la seconde guerre mondiale, à travers les témoignages des rares personnes encore en vie, et surtout en rassemblant des documents, photos et courriers échangés, la banalité des préoccupations m’avait frappée. Les courriers parlaient de la femme embauchée pendant deux jours pour faire la grande lessive annuelle, du menu concocté malgré la pénurie pour la communion des enfants, du changement de maitresse d'école, des pommes de terre récoltées, de la moisson, de la fête des mères… La vie de tous les jours, en fait.

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Car quels que soient « les temps qui courent », la vie continue pour chaque individu. Et chaque individu doit juste faire de son mieux ce qu’il sait faire et ce qui est à sa portée, que ce soit soigner, trier ses déchets, peindre, sculpter, limiter son empreinte carbone ou écrire !

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Depuis quelques jours, l'idée d'une nouvelle de science-fiction me trotte dans la tête...

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